Rapport moral 2024
ASSEMBLÉE GÉNÉRALE TIBHIRINE
du 2 avril 2024
Résumé du rapport moral
constats – convictions – actions à développer
CONSTATS
Vingt-huit ans de rencontres mensuelles où, dans la diversité et dans la confiance, nous « prêtons l’oreille aux murmures de la vie intérieure » aurait dit Etty Hillesum.
Autour d’un thème ou des actualités d’une tradition : accueillir et mieux comprendre cette vie intérieure que chacun porte en soi, pour soi et pour les autres… Entre personnes de différentes spiritualités devenir source de paix un peu à l’exemple du « Ribât-Es-Salam », « le lien de la Paix », fondé par Claude Rault et Christian de Chergé, 1979, en Algérie. Voilà qui revient à nous laisser interroger, enrichir par l’existence de l’autre au travers de l’accueil et d’une meilleure compréhension de la vie spirituelle qui l’anime…
Temps privilégié d’échanges puisque c’est nous rencontrer et mieux nous connaître à partir de ce qui nous fait vivre en profondeur.
État des lieux d’après Jean-Paul Willaime (1)
Paysage religieux en mutation, « la modernité ne signifie pas moins de religion, mais du religieux autrement, du religieux qui se pluralise et se recompose ». Des minorités actives qui proposent, dans un état laïc, et non imposent, des façons de concevoir et de vivre la condition humaine. Première religion de France : la non- appartenance. « Décatholicisation de la
France » : passant de 70 % à 32 % (de 2018 à 1981), dont 15 % des 18-29 ans qui se déclarent encore catholiques !
« La France religieuse du XXIe siècle est une France de minorités et des diversités religieuses ».
Accroissement des personnes se déclarant appartenir à une autre religion que le catholicisme : 3 % en1981 à 10% en 2018. Musulmans de 6 % à 13 % parmi les 18-29 ans, 18 % des catholiques dans cette tranche d’âge ».
Une forte pluralité interne dans chaque groupe religieux : une ‟désinstitutionnalisation du religieux ʺ. « Le fait d’avoir une religion et de la pratiquer constitue un non-conformisme dans une société globale qui est non religieuse », l’inverse avant.
« Émergence d’un ‟religieux flottantʺ (liquide) qui cherche des mots pour se dire et des liens pour se vivre ».
Bref, des ‘’archipels de communautés juxtaposées’’ jusqu’à l’intérieur d’une même religion. « Des mille et une façon d’être juif et musulman » (2) mais aussi catholique, protestant, orthodoxe…
Un appauvrissement des représentations des religions, acculturation et confusions…
Rejet des religions dans les médias et sur le Web : scandales, réductions aux dimensions morales, à l’intégrisme et au fondamentalisme, perçues comme des instruments de prêt –à-penser ou de terreur…
Montée croissante des actes antireligieux – islamophobie – antisémitisme, pillages d’églises…
CONVICTIONS
Le dialogue interreligieux et spirituel devient indispensable dans une société plurielle et sécularisée pour contribuer à la communication, à l’entraide, à la citoyenneté (obligation extérieure). A moins d’être fondamentaliste, l’obligation au dialogue vaut aussi pour sa foi, réflexive et critique, toujours en quête, en attente (obligation intérieure).
Le dialogue interreligieux et des spiritualités est un acte d’humanité qui contribue à ces deux obligations.
Nous devons contribuer à maintenir un lieu d’expression interreligieux des questionnements spirituels, la quête de sens qui innerve toutes les grandes questions du lien à soi, aux autres, à la nature… Toutes spiritualités, valeurs, convictions orientées vers la vie, nécessitent d’être vécues et exprimées individuellement et collectivement pour exister.
Notre façon d’être là, notre lien à une transcendance ou pas, à ce qui nous dépasse et nous donne souffle, constituent des univers inépuisables à explorer et à communiquer au travers des expériences de chacun…
La mise en commun de nos récits, de ce qui fait sens pour nous, contribue à faire société.
ACTIONS À DÉVELOPPER
Dialoguer avec la société sécularisée :
Contribuer à faire reconnaître, au sein de la cité les besoins spirituels comme inhérents à tout être
humain ;
Contribuer à l’expression et aux apports du religieux et des spiritualités ;
Des jalons : la cérémonie des vœux, des liens avec les autorités à développer (municipalités, préfecture,
région).
Contribuer à :
Redynamiser le dialogue interreligieux et spirituel, auquel certains ne croient plus ;
ller à l’encontre des replis identitaires et de la montée de la violence ;
Mieux faire reconnaître ce dialogue au sein de la société française pour mieux faire société et
démontrer son actualité, sa nécessité et son urgence ;
Mieux connaître des groupes du dialogue interreligieux et leurs activités ;
Contribuer à leur connaissance et favoriser notre mise en synergie sur le plan local et national, en lien
avec la Conférence Mondiale de Religion pour la Paix (C.M.R.P).
Maintenir les solidarités, créer du collectif :
Permettre la rencontre avec l’autre dans une grande ville comme Nantes, toujours plus soumise aux risques d’individualisation et de ségrégation ;
Vivre ensemble des spiritualités à travers l’arrivée de personnes venant d’horizons de plus en plus variés ;
Contribuer à créer les conditions favorables à la coexistence religieuse, à l’intégration et à la cohésion
sociale ;
Favoriser les réponses aux besoins de spiritualité de la population : les programmes scolaires et universitaires doivent intégrer l’enseignement de la diversité culturelle, du dialogue interreligieux, des principes de la tolérance et de la reconnaissance des différences comme une richesse ;
Lutter contre l’ignorance par l’enseignement du fait religieux auprès des jeunes et des adultes : conférences, forums, visites, espaces de rencontres, bibliothèque interreligieuse… ;
Diffuser le bulletin mensuel de Tibhirine ;
Développer le site internet.
(1) Jean-Paul Willaime et Denis Portier : « La religion dans la France contemporaine ». Ed. A.Colin, 2021.
(2) Delphine Hovilleur et Rachid Benzine : « Des mille et une façons d’être juif ou musulman » Ed. Seuil.
Jean-Luc Frémon
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